100e billet du blog !

Déjà 100 !

Et oui, déjà cent billets. S’il pourrait paraître surprenant d’avoir eu tant de choses à raconter sur un si petit livre, les sujets dont nous souhaitons encore parler ne manquent pas. Et, si les conditions se maintiennent propices, ils représentent encore pour plusieurs années de parution (tout sera en réalité affaire de temps disponible).

Il y a en effet encore de très nombreuses pistes à explorer, dans chacun des domaines explorés par ce blog : études générales sur le traité, études historiques, exégèse du texte et réflexions diverses. Quant à l’actualité, force est de constater que Sun Tzu a encore de beau jours devant lui (dommage qu’il ne touche pas de droits d’auteur…), ne serait-ce qu’à cause de la place croissante de la Chine dans le monde.

Le sujet du blog est très précis (un unique ouvrage, qui plus est gros de seulement quelques dizaines de pages), mais il ne s’avère pas singulier : outre les livres commerciaux qui disposent de leur propre blog pour assurer leur promotion et ceux dédiés aux livres religieux (Bible, Coran, Talmud, etc.), on pourra par exemple découvrir le très beau site consacré au Petit Prince.

Et pour finir, les cinq billets les plus lus ont été :

1) Quelle traduction retenir ?
2) L’art de la guerre en bande dessinée
3) Le paradoxe du travail bien fait
4) Jusqu’où interpréter Sun Tzu ?
5) Des qualités requises pour être général

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Le calcul épargne le sang : du pouvoir de la planification

Pas de victoire sans planification

Pas de victoire sans planification

La planification est un pilier du système suntzéen. Elle peut permettre, à elle seule, d’éviter l’affrontement armé.

Cette planification est un garant, voire une condition sine qua non, de la victoire :

« Une armée est victorieuse si elle cherche à vaincre avant de combattre ; elle est vaincue si elle cherche à combattre avant de vaincre. » (chapitre 4)

Par sa croyance immodérée dans les vertus de la planification, le système suntzéen réfute l’idée clausewitzienne de friction. Peut-être le stratège chinois n’avait-il pas une claire conscience de cette notion, mais peut-être aussi était-il convaincu du pouvoir de la planification, à l’instar des espoirs que les Américains ont pu porter durant les années 90 dans leur concept de Révolution dans les Affaires Militaires.

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Une qualité : la réactivité

Tel le serpent, l’armée doit toujours être prête à bondir sur son objectif

Tel le serpent, l’armée doit toujours être prête à bondir sur son objectif

La réactivité est une qualité essentielle prônée dans L’art de la guerre :

« Il faut […] profiter de la moindre opportunité pour emporter l’avantage. » (chapitre 1)

« A la guerre, il ne faut pas compter que l’ennemi ne viendra pas, mais être en mesure de le contrer. » (chapitre 8)

Sun Tzu a parfaitement conscience que l’exécution de tout plan est soumis à nombre d’aléas, qu’ils soient climatiques ou géographiques, ou qu’ils soient dus à une mauvaise intuition de ce qu’allait entreprendre l’adversaire. Sun Tzu chercher à minimiser le brouillard de la guerre par le renseignement, mais admet à demi-mot que les frictions demeurent possibles. Pour tenter d’obtenir la maîtrise sur ces facteurs, le général doit en comprendre la logique et s’y adapter. Ainsi, Sun Tzu décortique cette réactivité en quatre qualités primaires : coup d’œil tactique, intelligence, rapidité et manœuvrabilité.

La première de ces qualités est donc le coup d’œil tactique, c’est-à-dire la parfaite conscience du bon moment :

« Le grand chef de guerre […] ne laisse jamais passer l’occasion de la victoire. » (chapitre 4)

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De l’incompréhension classique de L’art de la guerre

Un ouvrage donnant une vision incorrecte de L'art de la guerre

Un ouvrage donnant une vision erronée de L’art de la guerre

La récente parution de l’ouvrage Le grand livre de la Chine va nous servir d’illustration pour évoquer un problème récurrent dans les fiches de lecture de L’art de la guerre : l’incompréhension de la nature chaotique du traité.

En effet, dans le cadre de son étude de la Chine, l’ouvrage consacre quelques pages au traité de Sun Tzu, le présentant en ces termes :

L’Art de la guerre est constitué de treize articles qui couvrent tous les sujets militaires pour mener à la victoire. Ainsi sont évoqués les thèmes de l’évaluation, de l’engagement, de la stratégie, des analyses du plein et du vide, des neufs changements, des attaques par le feu… Le livre enseigne les cinq facteurs de la réussite : [le dao, le ciel, la terre, le commandant et l’organisation.]

Ces propos reflètent, selon nous, une lecture totalement superficielle du livre relevant du simple survol mal compris. En effet, s’attacher à la structure des chapitres (ou articles) et y comprendre une réflexion organisée et structurée sur la guerre est une erreur : L’art de la guerre ne peut se lire comme un traité moderne, architecturé selon une logique démonstrative. Les propos, bien que rassemblés sous forme de chapitres, n’ont pas d’ordre précis ni de liens entre eux. L’art de la guerre doit être considéré comme un ensemble de maximes disparates, dont certaines se rassemblent il est vrai en paragraphes cohérents, pour lesquelles seule une lecture globale se détachant de la structure en chapitre permet de bien saisir le sens.

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Des niveaux tactique et stratégique

Tactique ou stratégie ?

Tactique ou stratégie ?

Afin de poursuivre la réflexion commencée dans le billet Jusqu’où interpréter Sun Tzu ?, nous allons nous intéresser à un type de détournement des propos de L’art de la guerre relativement pernicieux : celui de la confusion des niveaux tactique et stratégique.

Notons pour commencer que Sun Tzu ne formalise pas cette existence de différents niveaux de décision. Il les voyait probablement comme un continuum et non comme des catégories pouvant présenter des ruptures. Nous tâcherons cependant ici de lire son traité à travers ce prisme d’une distinction entre le niveau stratégique et le niveau tactique[1].

Certains des préceptes de L’art de la guerre sont rattachables avec certitude à un niveau :

« On n’entreprend pas une action qui ne répond pas aux intérêts du pays, on ne recourt pas aux armes sans être sûr du succès, on ne combat pas lorsqu’on n’est pas menacé. » (chapitre 12) : niveau stratégique

« Si les oiseaux s’envolent, il y a embuscade, si les quadrupèdes fuient, il se prépare une offensive générale. » (chapitre 9) : niveau tactique

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