Des alliances

La pensée de Sun Tzu n'est pas claire concernant les alliances

La pensée de Sun Tzu n’est pas claire concernant les alliances

L’affrontement physique ne doit pas être vu comme le seul moyen possible de résoudre un conflit. Il ne faut au contraire s’y résoudre que si toutes les autres formes possibles de conquête de la victoire ont échoué :

« Etre victorieux dans tous les combats n’est pas le fin du fin ; soumettre l’ennemi sans croiser le fer, voilà le fin du fin. » (chapitre 3)

Pour ne pas en arriver aux effusions de sang, le général dispose d’au moins deux procédés :

« Le mieux, à la guerre, consiste à attaquer les plans de l’ennemi ; ensuite ses alliances ; ensuite ses troupes ; en dernier ses villes. » (chapitre 3)

Après avoir étudié comment attaquer les plans de l’ennemi, nous allons ici nous intéresser à cette autre entreprise préventive possible : l’action sur les alliances.

L’art de la guerre parle de « ballet diplomatique » :

«  […] A ceci s’ajoutent les dépenses pour supporter les efforts de l’arrière et du front, les frais occasionnés par le ballet diplomatique entre royaumes […] » (chapitre 2)

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De la fluidité, suite

L'eau s'adapte à ce qu'elle rencontre.

L’eau s’adapte à ce qu’elle rencontre.

Note : Ce billet complète celui sur la fluidité paru l’année dernière.

Nous avions vu dans des billets comme De la marche à l’ennemi ou De l’initiative qu’une des applications du système suntzéen pourrait être une installation en défensive, en mesure de varianter immédiatement pour saisir toute opportunité. L’image de l’eau s’écoulant des hauteurs est à cet égard assez révélatrice et pourrait être considérée comme une transposition verticale d’une situation horizontale : l’armée avance, et dès qu’elle rencontre une résistance (un cratère), elle attend et en profite pour consolider sa position. Si une faille se présente, ou si son état de préparation (remplissage) devient suffisant, elle peut à ce moment-là tomber plus bas.

Tout d’abord, l’eau évoque la fluidité d’une bonne armée qui sait se plier à tous les retournements et répondre à toutes les initiatives de l’adversaire. Un grand capitaine remporte ses victoires en s’adaptant aux mouvements de l’ennemi. Il n’a pas de dispositions constantes, de même que l’eau n’a pas de forme fixe. Elle n’est que ce que fait d’elle le contexte qui l’accueille ou la recueille. Il est dans la nature de l’eau d’éviter les élévations de terrain, de les contourner pour se couler dans les dépressions ; ainsi en est-il d’une troupe qui doit s’employer à éviter les points forts pour attaquer les points faibles de l’adversaire.

Cela suppose que le général dispose de l’agilité d’esprit et l’humilité suffisantes pour ne jamais s’entêter dans une manœuvre qu’il a arrêtée à un instant donné ; qu’il ait toujours la force d’être en réaction ; qu’il n’ait jamais de faiblesse qui lui ferait subir la manœuvre de l’adversaire ; qu’il soit sans cesse à l’écoute, aux aguets, sur le qui-vive d’un besoin de réajustement ou de reconstruction totale de sa manœuvre. Il ne s’agit pas là d’une réactivité passive, où l’on serait attentiste à la manœuvre de l’adversaire, mais d’une réactivité active, où l’on « travaille » l’autre pour l’amener à commettre des fautes, à présenter des ouvertures, à se relâcher ; et nous à l’exploiter.

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Le positionnement, un avantage stratégique majeur

Ce n'est certes que de l'eau, mais mieux vaut ne pas se trouver en dessous

Ce n’est certes que de l’eau, mais mieux vaut ne pas se trouver en dessous

Pour importante qu’elle soit, la qualité guerrière des soldats n’est pas un facteur déterminant de la victoire :

« L’habile homme de guerre s’appuie sur la position stratégique et non sur des qualités personnelles. » (chapitre 5)

La quantité de troupes alignées, quant à elle, n’influe que peu sur l’issue de la bataille :

« A la guerre, le nombre n’est pas un facteur décisif. » (chapitre 9)

Pourquoi ? Parce que ces facteurs peuvent être supplantés par les « avantages stratégiques » :

« Quand, sans avantage stratégique, on combat à un contre dix, il y aura fuite. » (chapitre 10)

Ces avantages sont des multiplicateurs d’efficacité. Sun Tzu évoque ici le placement des troupes. Cela s’entend non seulement par « comment elles sont placées » mais également par « où elles sont placées ».

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Le premier numéro de Guerres et batailles traite de Sun Tzu

Un petit dossier consacré à Sun Tzu

Un petit dossier consacré à Sun Tzu

Une nouvelle revue consacrée à l’histoire militaire vient de paraître : Guerres et batailles dans l’Histoire du Monde. Arrivant sur un marché déjà pléthorique sur le sujet, ce bimestriel de 100 pages fait la part belle aux illustrations. Et un article sur Sun Tzu y figure !

Nous nous garderons de le commenter, votre serviteur en étant l’auteur. L’article se prolonge par un large extrait de L’art de guerre : les trois premiers chapitres au complet, dans leur traduction du Père Amiot.

Bonne chance, donc, à ce nouveau-né.

5,90 € chez tous les marchands de journaux.

Source de l’image

Du lien entre le général et ses troupes

La première grande réflexion française sur le sujet : le Du contrat social de Rousseau

La première grande réflexion française sur le sujet : le Du contrat social de Rousseau

Pour Sun Tzu, la qualité du lien existant entre le général et ses troupes est la meilleure garantie de l’invincibilité  :

« La guerre est subordonnée à cinq facteurs ; ils doivent être pris en compte dans les calculs afin de déterminer avec exactitude la balance des forces. Le premier est la vertu […]. La vertu est ce qui assure la cohésion entre supérieurs et inférieurs, et incite ces derniers à accompagner leur chef dans la mort comme dans la vie, sans crainte du danger. » (chapitre 1)

Cette cohésion se gagne par l’expression d’une qualité du général : la vertu (Jean Lévi précise pour son choix de traduction de « vertu » que le terme doit être entendu au sens qu’il a chez Montesquieu : la force morale donnée à une nation par ses mœurs et ses institutions).

Nous avons écrit « le lien existant entre le général et ses troupes », mais il s’agit là d’une compréhension de certains traducteurs (dont celui auquel nous nous référons : Jean Lévi), qui n’est pas unanimement partagée. Ainsi, d’autres traducteurs français considèrent que Sun Tzu entendait le sujet comme étant le peuple entier (Alexis Lavis, Tang Jialong, Samuel Griffith, Groupe Denma, père Amiot), le souverain (Valérie Niquet, manga de Wang Xuanming), ou le seul général (Jean Lévi, Jean-François Phelizon).

D’ailleurs, le niveau « peuple – souverain » paraitrait plus cohérent avec la déclinaison que donne par la suite Sun Tzu dans son énumération de facteurs de supériorité du chapitre 1 (nous y reviendrons dans un prochain billet) :

« La guerre est subordonnée à cinq facteurs ; […] Le premier est la vertu […] »

>>> « La vertu est ce qui assure la cohésion entre supérieurs et inférieurs, et incite ces derniers à accompagner leur chef dans la mort comme dans la vie, sans crainte du danger. […] »

>>> « Pris en compte dans les calculs, [ces facteurs] permettent une évaluation exacte du rapport de forces. Il suffit pour cela de se demander : Qui a les meilleures institutions ? […] »

D’autres passages semblent de même attribuer cette vertu au général : Continuer la lecture