Un nouveau livre vient de sortir, et, autant le dire tout de suite, il est excellent !
L’art de la guerre et la culture du bonsaï est en effet une application des maximes de Sun Tzu à cet art ancestral que constitue l’arbre miniature (qui, contrairement à ce que l’on croit souvent, est originaire de Chine et non du Japon). L’auteur, Laurent Gordelès, maîtrise chacun des deux sujets et parvient à rendre passionnante la lecture de son ouvrage, tant pour les amateurs du stratège chinois que pour les botanistes en herbe.
Chacun des préceptes de Sun Tzu est ainsi explicité pour nous apprendre comment choisir, donner naissance, faire croître et enfin exposer ces trésors de la nature. Le sujet semble traité de façon exhaustive (l’ouvrage fait tout de même 432 pages !). Cet angle de lecture réussit même la gageure de rendre l’étude pas-à-pas de L’art de la guerre beaucoup plus logique que lorsqu’on l’applique au domaine de la confrontation armée, les chapitres de L’art de la guerre étant suivis scrupuleusement. Ainsi le onzième, « Les neuf sortes de terrain », nous donne-t-il toutes les clés pour comprendre que le meilleur terrain pour les bonsaï est celui fait de terreau de tourbe, d’humus d’écorce fine et de lave pulvérisée, et que tous les autres ne peuvent être considérés que comme des « terres d’anéantissement ».
Il est surprenant de constater comment chacune des maximes de Sun Tzu apparaît parfaitement adaptée à cette lecture botaniste, parfois bien plus que la lecture classique tournée vers la confrontation armée. Ainsi, la sévérité indispensable au général enjointe au chapitre 1 explicite de manière très juste que l’on ne peut réussir un bonsaï si l’on n’accepte pas le principe de torturer ces arbres. De la sous-nutrition calculée à la ligature des branches, il est ainsi parfaitement adapté de dire que « si l’on se refuse à appliquer les châtiments sous prétexte que [les hommes] vous sont attachés, ils ne pourront servir au combat. » (chapitre 9)
Les grands principes de Sun Tzu prennent de même ici tout leur sens. Si la notion de forme, particulièrement présente dans L’art de la guerre (nous y reviendrons dans un prochain billet), ne produit qu’un faible écho lorsqu’appliquée à la conduite des armées (« La forme d’une armée est identique à l’eau. […] Une armée n’a pas de dispositif rigide, pas plus que l’eau n’a de forme fixe. », chapitre 6), elle fait en revanche pleinement sens lorsqu’appliquée aux bonsaï. Un chapitre entier est ainsi consacré à tous les conseils que donne Sun Tzu pour maîtriser ce végétal qui, sans l’intervention du général, ne pourrait jamais obtenir cette forme d’arbre miniature.
Bien évidemment, fidèle aux recommandations de Sun Tzu, l’étude de l’ennemi fait également l’objet d’un chapitre entier : des larves de la cochenille farineuse aux maladies transmises par l’araignée rouge, chaque type d’attaque se trouve ici contrée suivant les préceptes de L’art de la guerre.
N’en ayant pas les compétences, je ne me prononcerai pas sur le succès que rencontrera ce livre auprès du public bonsaïophile pour lequel une abondante littérature existe déjà. Je suis en revanche convaincu que L’art de la guerre et la culture du bonsaï devrait trouver sa place à côté de chaque traité de Sun Tzu, tant est profonde la compréhension dont témoigne l’auteur du sens véritable des maximes du stratège chinois. Au final, Laurent Gordelès parvient à réellement nous donner l’impression que le thème premier du traité de Sun Tzu était la culture des bonsaï, et que la guerre n’a été qu’une interprétation dérivée de ce manuel de botanique !
Source de l’image : photo de l’auteur
Bien sûr, vous avez trouvé l’idée d’un tel ouvrage absurde. Et vous avez parfaitement raison : il s’agit d’un poisson d’avril !
Sauf que… est-elle vraiment plus absurde que les dizaines qui existent déjà sur des sujets comme la médecine ou l’éducation des enfants ?
Nous nous étions interrogés à travers les billets Pourquoi trouve-on autant de transpositions de L’art de la guerre et De l'(in-)utilité des transpositions de L’art de la guerre sur ce phénomène, estimant que la plasticité du traité de Sun Tzu autorisait une grande palette d’interprétations. Des auteurs comme Khoo Kheng-Hor ou Gary Gagliardi ont même fait une véritable industrie de ce créneau de l’adaptation de Sun Tzu à différents domaines de la vie.
Nous savons quoi faire pour notre reconversion…
Ce n’est pas en faisant la publicité de ce genre de livre que le niveau du blog va s’élever.
Ou alors ai-je mal compris? Et ce blog a pour ambition de faire le catalogue de tous les ouvrages qui ont les mots « Sun Tzu » dans le titre?
Effectivement, il y a matière mais est-ce vraiment intéressant? pour moi, c’est décevant. On s’attend à plus.
Une analyse du contenu de l’oeuvre de Sun tzu me semblerait plus intéressante.
Analyser, pas décrire, se mouiller, oser des interprétations, donner son avis, s’attaquer au texte… bref, passer au niveau supérieur.
Je vous encourage à oser! Comme le disait ce cher Napoléon, ne pas oser, c’est ne rien faire qui vaille…
Merci pour votre commentaire, qui témoigne d’une forte attente d’un tel blog consacré à l’étude de L’art de la guerre.
Votre remarque est pleine de bon sens. Je vous invite toutefois à lire le commentaire précédent le vôtre.
En outre, après 87 billets déjà mis en ligne, je suis surpris que vous n’en ayez pas trouvé un ou deux qui « analyse, se mouille, ose des interprétations, donne son avis, s’attaque au texte ». Peut-être, comme pour les œufs de Pâques, convient-il d’un peu chercher…
Je rejoins les commentaires précédents.
J’ai du mal à voir l’intérêt d’un tel article, qui ne fait pas du tout avancer la recherche sur Sun Tzu.
Enfin, il faut bien « remplir » le blog… mais c’est décevant.
Bonjour,
L’humour peut aussi permettre de véhiculer certaines idées. D’aucuns pourraient ainsi voir dans ce billet une certaine prise de distance avec les adaptations régulières de Sun Tzu aux domaines les plus farfelus…
je vous trouve bien sévères dans vos commentaires. Nous sommes sur un site amateur et en aucun cas sur celui d’un universitaire. Il fait ce qu’il peut, à son niveau.
Tous ces spécialistes auto proclamés de Sun Tzu prêtent à sourire mais après tout pourquoi pas?
Je suis cependant d’accord avec vous: présenter ce livre sur un site qui se veut sérieux est un faux pas.
Bonjour,
Merci pour votre commentaire, que je prends comme un compliment du poisson d’avril réalisé.
Quant à l’aspect universitaire, je vous laisse voir : mes travaux sur Sun Tzu ont fait l’objet d’un Master II à l’Ecole Pratique des Hautes Études et se sont notamment vus décerner le prix scientifique de l’Institut des Hautes Études de la Défense Nationale. Maintenant, il faut savoir rester humble : il y a toujours plus érudit que soi ailleurs, et je suis loin d’être le seul à avoir quelque chose à dire sur Sun Tzu. Encore faut-il le faire.
Bof. Quel intérêt de présenter un livre comme cela? Franchement, je ne vois pas trop malgré vos explications. Peut-être faudrait-il recentrer le sujet sur Sun Tzu? Et écarter les innombrables livres sur Sun Tzu sans rapport avec la stratégie, les relations internationales ou la guerre. De cette façon, nous pourrions avoir des discussions constructives sur Sun Tzu. Chacun pourrait donner son opinion, ses arguments, faire avancer le débat.
Quel commentaire peut-on faire sur ce livre quand on ne connaît rien aux bonsaïs??? personnellement, je ne m’avancerais pas à donner une opinion sur ce livre que je n’ai aucune envie d’acheter. Ce livre fait partie de la longue liste des essais sur « Sun Tzu et n’importe quoi » comme le dit un de nos collègues.
Je vous trouve bien agressif face aux commentaires que les gens laissent. Personnellement, je n’ai jamais entendu parler de vous dans le milieu universitaire. Et nous n’avons malheureusement pas eu le plaisir de vous voir au colloque qui s’est tenu il y a quelques temps à l’université de Columbia. Je suis venue sur votre blog sur la recommandation d’une amie.
En espérant des discussions plus constructives dans le futur, ici, ou ailleurs.
Alex, Lucie, Pierre Jean, Johanna et tous les autres jeunes récents commentateurs de mes billets : je vous remercie tous beaucoup pour cette séance de joute commencée il y a quelques jours. La dynamique de la critique n’a pas manqué d’être stimulante. Vous comprendrez cependant que j’y mette un terme afin de ne pas trop disperser l’énergie dont j’ai besoin pour rédiger mes prochains billets. Sauf bien sûr s’ils venaient à présenter un réel intérêt, vos prochains commentaires ne seront donc pas publiés.
C’est assez triste de lire ces commentaires, on perçoit une certaine morgue et suffisance derrière l’écriture policée.
En tout cas, j’ai accroché au poisson d’avril, c’était réussi 🙂