Dans les versions françaises de L’art de la guerre, les notions spécifiquement chinoises, non immédiatement traduisibles, peuvent être traitées de façon fort différente. A titre d’illustration, nous allons détailler l’exemple, peu familier des Occidentaux, des moyens « ordinaires » (正, « zheng ») et « extraordinaires » (奇, « qi »). Ils constituent le thème principal du chapitre 5.
De façon simplifiée (et forcément réductrice), les moyens ordinaires sont tous les procédés auxquels s’attend l’adversaire, tandis que les moyens extraordinaires recouvrent au contraire ceux auxquels il ne s’attend pas. Mao Zedong, adhérant à cette idée, entretenait ainsi parallèlement l’Armée Populaire de Libération (moyens ordinaires) et les milices populaires (moyens extraordinaires), et ce même après sa victoire en 1949. La situation peut cependant être plus subtile qu’une simple transposition avec l’attaque directe et l’attaque indirecte. Ainsi, de façon non-intuitive, si l’on sait que l’ennemi s’attend à une embuscade de notre part, cette dernière sera le moyen ordinaire et l’attaque frontale le moyen extraordinaire. En outre, le moyen extraordinaire peut également être immatériel, comme une ruse.
Le niveau de détail fourni par les traducteurs sur cette notion est extrêmement divers. Il va de l’absence pure et simple d’explication (Luo Shenyi) à des chapitres complets consacrés à cette notion en complément du texte (Jean Lévi, groupe Denma et James Trapp). L’énumération suivante est ordonnée selon la chronologie de parution des traductions françaises : Continuer la lecture