Les versions numériques de L’art de la guerre sont nombreuses. Comme nous l’avions vu dans le billet Il n’y a pas que les livres papier !, quasiment toutes se basent sur une des traductions-avatars du père Amiot (Impensé radical ou Lucien Nachin). Seuls le prix (de gratuit à 10 € !…) et l’illustration de couverture les différencient. Il en paraît au moins une par mois. Mais la dernière version à être sortie, passée totalement inaperçue, présente pourtant du nouveau.
Baptisé « L’art de la Guerre (Illustré et Annoté) » cet ouvrage numérique disponible pour 2 € au format Kindle ou iBooks présente plusieurs caractéristiques inédites :
Il comprend des illustrations réalisées spécifiquement pour cette édition. Quinze peintures de Onésimo Colavidas, vaguement en rapport avec les chapitres qu’elles illustrent, agrémentent le texte.
Le texte est réellement celui du père Amiot et non, comme à l’accoutumée, celui de Lucien Nachin ou de l’Impensé radical (Cf. notre billet De l’imposture des traductions dites « du père Amiot »).
Le traité est complété de l’article de Guy de Contenson paru en 1900 dans La nouvelle revue et intitulé « L’art militaire des Chinois d’après leurs classiques », article que nous avions commenté dans notre billet Sun Tzu au XIXe siècle. Dans ce texte, très empreint d’une vision colonialiste, l’ancien attaché militaire en Chine voulait montrer la différence d’état d’esprit existant entre les armées chinoises et occidentales.
Notons enfin qu’une préface de trois pages parachève l’ensemble. Sans être inintéressante à lire, elle ne révolutionne toutefois pas la réflexion sur L’art de la guerre.
Que penser au final de cette édition numérique ? La traduction est celle du père Amiot, que nous savons totalement datée, mais qui présente la caractéristique d’être la seule avec le vrai texte de 1772 (on pourra cependant trouver cette version sur le site Chine ancienne). Toutefois, cela ne présente pas réellement d’intérêt autrement que pour l’historien. L’article de Guy de Contenson n’a de même qu’une valeur historique. Il n’apporte que peu d’éléments réellement utiles (et fait même preuve d’un racisme flagrant envers les Chinois) ; il est disponible gratuitement sur Internet. Au final, seules les illustrations de Colavidas constituent une nouveauté intéressante. Mais de là à dire qu’elles présentent un réel intérêt, nous restons mitigés…
Le tout pour deux euros.
A chacun de juger. En tout état de cause, « L’art de la Guerre (Illustré et Annoté) » sort manifestement du lot des versions disponibles en numérique, avec « L’art de la guerre + vidéos » pour iPad (traduction de Valérie Niquet) et « L’art de la guerre commenté » des éditions Pratikeo (traduction du père Amiot – version de Gabriel Lechevallier, avec commentaires).