« Pillez en terrain de diligence. » (chapitre 11)
Indubitablement, Sun Tzu préconise le pillage. Deux raisons à cela : assurer sa logistique, et motiver ses hommes (en leur promettant de se récompenser sur la bête).
Assurer sa logistique :
« Qui est habile à conduire les armées ne procède jamais à deux levées consécutives ni n’a besoin de trois réquisitions de grains. Ses ressources propres lui suffisent et il puise ses vivres chez l’ennemi. C’est ainsi qu’il assure la subsistance de ses troupes. » (chapitre 2)
« Un général avisé s’emploie à vivre sur l’ennemi. Car une mesure prise sur lui en épargne vingt acheminées depuis l’arrière. Un boisseau de fourrage mangé chez lui en vaut vingt venus de l’arrière. » (chapitre 2)
« On pourvoit aux besoins en nourriture des troupes en pillant les campagnes fertiles. » (chapitre 11)
Motiver ses hommes :
« En appâtant [ses hommes] par la promesse de récompenses, [le général] les incite à attaquer l’ennemi pour s’emparer du butin. » (chapitre 2)
« Quand on pille une région, on répartit le butin entre ses hommes ; lorsqu’on occupe un territoire, on en distribue les profits. » (chapitre 7)
Si les deux problématiques évoquées sont toujours d’actualité (comment approvisionner ses troupes ? comment les motiver ?), la réponse qu’en donne Sun Tzu est, elle, apparemment datée.
« Apparemment », car ce procédé du pillage peut encore s’avérer pertinent aujourd’hui. Ainsi, en combat de guérilla, il n’est pas incongru de chercher à dépouiller l’armée adverse (et non le peuple) ses entrepôts, ses zones de ravitaillement, ses armureries, etc. C’est d’ailleurs ce que fait actuellement Daech : le groupe armé pille les dépôts d’équipement de l’armée irakienne pour compléter son arsenal et pompe le brut des zones pétrolières capturées pour le revendre au marché noir. En revanche, les combattants islamistes font preuve de contrôle vis-à-vis des populations sunnites afin de ne pas encourager les révoltes des tribus.
Nota : Des exégètes historiques contestent que Sun Tzu puisse préconiser le pillage. Déjà, du point de vue de la traduction, Samuel Griffith souligne en note de bas de page que certains commentateurs estiment que la maxime « Pillez en terrain de diligence » du chapitre 11 devrait au contraire être traduite par « Ne pillez pas ».
A un autre endroit, la maxime « L’expert en stratégie, cultivant le Principe et attentif aux lois, est le dispensateur de la victoire et de la défaite » du chapitre 4 amène le commentaire suivant de Li Quan, auteur militaire chinois du IXe siècle :
Selon les règles qui gouvernent la répression des troubles, il ne faut pas lancer une expédition punitive contre un pays qui n’a pas commis de faute. L’armée ne doit pas pratiquer le pillage, brûler les arbres, souiller les puits ou les foyers, détruire les campagnes traversées, les villes, les tombeaux et les temples des ancêtres. Il faut accepter de grimper les degrés qui mènent à la salle principale du palais et ne pas mépriser les affaires du pays vaincu. C’est ce que l’on désigne par [le principe] et les lois.
De toute la difficulté à traduire Sun Tzu…